Entrevue avec l'auteure
Comment avez-vous commencé à écrire ? Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur votre passion des mots ?
À sept ans, je me voulais « écriveuse » de livres (je ne connaissais pas encore le mot écrivaine). Je me suis mise au travail sur de petits albums illustrés. Plus tard, écrits à la main et en un seul exemplaire, mes romans feuilletons tenaient en haleine mes amies du secondaire.
Mes études collégiales et le travail m’ont interrompue et je n’ai repris l’écriture qu’en 1996 avec un roman pour la jeunesse, arraché à mes rares temps libres, publié chez un éditeur agréé et récipiendaire du prix littéraire de la Plume saguenéenne. J’étais une vraie écriveuse.
Depuis, j’ai signé vingt-et-un ouvrages. Merveilleuse façon de me réaliser, d’accumuler du savoir, d’apprendre non seulement à jouer avec la langue et la musique des mots, mais à connaître l’autre autant que moi-même.
Est-ce que vous pourriez nous dire quelques mots au sujet de votre nouveau roman, La rêveuse de Deux-Rives ?
À sa manière, La rêveuse de Deux-Rives illustre certains écueils, tourments et remises en question vécus au cours de ma carrière. C’est l’histoire d’une jeune femme qui veut vivre de sa plume, publier et être reconnue comme une auteure à part entière, et ce, sans avoir à sacrifier son désir de fonder une famille. Pour atteindre ce double objectif, mon héroïne, Alice Vézina, devra parfois jouer le tout pour le tout, quitte à arranger à sa convenance certaines situations et accepter des compromis pour le moins inattendus.
C’est le portrait à la fois daté et actuel d’une femme de tête et de cœur : plusieurs lectrices vont se reconnaître, même si elles ne sont pas elles-mêmes écrivaines.
Quelles sont vos inspirations ? D’où vous est venue l’idée d’un personnage de poétesse évoluant dans les années 1930 ?
L’idée et les germes me sont venus au cours d’échanges avec mon conjoint. Nous observons que le grand public connait assez peu cette période et les cinq ou six écrivaines qui s’y sont démarquées, dont Jovette Bernier et Éva Senécal. Ces femmes m’ont inspirée.
Pour mes précédents romans, mon éditeur m’avait proposé différents sujets parmi lesquels je retenais celui qui, spontanément, me touchait davantage. La cause des femmes me tient toujours à cœur.
Quand vous écrivez, vous laissez-vous inspirer au fil de l’histoire, ou suivez-vous fidèlement le plan imaginé ? Connaissez-vous la fin avant de l’écrire ?
Comme pour mes précédents titres, j’ai écrit La rêveuse de Deux-Rives à partir d’un plan détaillé, élaboré après des recherches préalables, en suivant une organisation précise et une discipline rigoureuse. Pour les romans historiques présentant des personnages réels, je connais la chute. Dans le cas de romans d’époque où des personnages fictifs se confrontent, comme ici, le plan évolue et certains d’entre eux me réservent des surprises d’où émergent originalité et revirements.
À quoi ressemble votre préparation en vue de l’écriture d’un roman d’époque ?
Je lis beaucoup d’ouvrages historiques, des documentaires, des biographies et des articles de journaux anciens. Je consulte des cartes géographiques et visite même certains lieux afin d’ancrer les personnages dans leur territoire. Pour incarner notre petite aussi bien que notre grande Histoire, les sources d’inspiration abondent : livres, bien sûr, mais aussi témoignages de première main, observations, photographies, souvenirs.
Pour La rêveuse de Deux-Rives, ajoutons les études universitaires, les œuvres des poétesses elles-mêmes, les biographies : un matériau riche.
Je me contrains à au moins 1000 mots par jour (quatre pages), tous les jours, après quoi je plonge dans une activité manuelle ou sportive. La discipline stricte : rien de plus efficace lorsqu’on doit respecter un contrat d’édition avec des échéances fixes.
Nous sommes curieux : connaissez-vous déjà le sujet de votre prochain roman ?
Au cours de la dernière décennie, j’ai écrit en moyenne un roman par année. Me voilà un peu essoufflée et une pause s’impose. Je vais laisser mijoter la soupe une saison ou deux !
Les allumettières
Marjolaine Bouchard